La vie des paysans
français au début du régime féodal fut, dans ces conditions, très
dure.
En vain, pour se mettre davantage à l'abri, avaient-ils cessé,
à la suite des pirateries normandes, d'habiter des maisons disséminés
et s'étaient-ils groupés en villages, où ils se sentaient moins
isolés.
Cela ne suffisait pas pour les défendre de l'insécurité, des disettes,
des épidémies, les trois grands fléaux des campagnes françaises
aux Xe et XIe siècles.
L'insécurité provenait des guerres
privées trop fréquentes et de la cruauté de certains seigneurs,
maltraitant le campagnard sans défense.
Les disettes :
Les dévastations des Normands
et les guerres avaient un peu partout diminué l'étendue des terres
cultivées ; sur celles-ci même, dans les guerres privées, les
combattants ne se gênaient pas pour tout détruire.
Aussi les récoltes insuffisantes étaient toujours à craindre et
provoquaient des disettes : au XIe siècle, on en compte
48 en soixante-treize ans.
Lors d'une famine particulièrement épouvantable, en 1031, la mesure
de blé coûta jusqu'à soixante sous d'or ; des malheureux, non
contents de ronger ses racines d'arbre ou de mélanger la craie
à la farine, allèrent dans la région de Mâcon, jusqu'à se nourrir
de chair humaine ; on en vendit même sur le marché de Tournus.
Les épidémies
:
Le manque d'hygiène et l'exiguïté des chaumières où s'entassaient
les campagnards facilitaient les maladies épidémiques.
La peste faisait de nombreuses victimes.
Au XIe siècle, une maladie étrange, le mal des ardents,
qui s'attaquait aux os, ravagea plusieurs contrées.
La lèpre surtout, amenée d'Orient par les marchands,
se répandit effroyablement ; on fut obligé de parquer les lépreux
dans des maisons solitaires, des léproseries, de leur imposer
le port de vêtements spéciaux, de couleur voyante, et ils devaient
en chemin agiter constamment une clochette, la cliquette,
pour qu'on pût s'écarter d'eux.
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Un lépreux agite la cliquette
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